Hassan Abdoulaye

Muhammadu Buhari au Tchad.

AFB_IMG_1433422620924près le Niger, le nouveau Président de la République Fédérale du Nigeria a rendu visite ce jeudi, 4 juin 2015, à son homologue tchadien. Muhammadu Buhari et Idriss Deby ITNO ont eu des entretiens portant particulièrement sur la situation sécuritaire dans la sous-région.

Le président nigérian qui a prêté serment il y a quelques jours a déclaré que sa priorité reste la sécurité du Nigeria en proie à la secte Boko Haram. Il s’est engagé à mobiliser tous les moyens pour venir à bout de ses terroristes. Pour y arriver, il demande la collaboration de tous les pays et surtout celle du Tchad, partenaire incontournable sans lequel l’éradication de Boko Haram serait difficile, voire impossible.

Pour le chef de l’Etat tchadien, l’insécurité perpétrée par la secte Boko Haram dans la sous-région a affecté considérablement l’économie du Tchad. En effet, le Nigeria, premier pays producteur du pétrole d’Afrique, est le premier partenaire commercial du Tchad dans la sous-région. Plus de 50 des importations se font vers le Nigéria ou via le Nigéria. Boko Haram

Le chef de l’Etat Tchadien réitère donc son engagement à soutenir le Nigéria dans lutte ses terroristes qu’il qualifié à des « coupeurs des têtes ». «  Le Tchad demeure aux côtés du Nigéria et est disposé à lui apporter tout son soutien pour le maintien de la paix et de la sécurité dans ce pays frère » rassure-t-il. Idriss Deby ITNO demande par ailleurs à la communauté internationale d’accompagner par tous les moyens les efforts déployés par les pays de la sous-région afin d’éradiquer la secte Boko Haram.


Pénurie d’eau à Abéché

Dans plusieurs quartiers les robinets ne coulent pas. La Société Tchadienne des Eaux (STE) n’arrive pas à satisfaire la population. Et cela arrive, malheureusement, au moment où la population a plus besoin d’eau car la chaleur est accablante. Il fait entre 38 et 40°Celsius.

Des colporteurs attendant être servis
Des colporteurs attendant être servis

Je passe devant un point de vente d’eau dans un quartier du 3ème arrondissement. Sous une chaleur perçante, une cinquantaine de colporteurs d’eau, certains assis à même le sol, d’autres debout sous le soleil à côté de leurs poussepousses. Tout le monde attend son tour pour remplir ses bidons (on compte dix bidons de vingt litre sur chaque poussepousse). Parmi eux, les clients en majorité des femmes, discutent le prix. A côté, un monsieur, assis sur une natte et tenant un cahier, enregistre chaque colporteur ayant rempli ses bidons, selon un numéro attribué à chacun.

Beaucoup me disent qu’ils ne font que deux, au trop trois voyages pendant toute la journée. Ils attendent environ trois du temps pour que leur tour arrive. Ils sont nombreux et la pression de l’eau est très faible.

L’eau c’est la vie. Nul ne peut vivre, ni rien ne peut se faire sans cette denrée vitale. Mais la population d’Abéché a du mal à s’en procurer. Comme les robinets ne coulent pas ou presque, les personnes qui ont des véhicules partent chercher l’eau à près de dix Km à la sortie sud d’Abéché, sur la route de Goz Beida. Ceux qui n’en ont pas comme moi se voient dans l’obligation d’acheter un bidon de vingt (20) litres d’eau entre 200 et 250 francs CFA en fonction des quartiers. Certains en ont même acheté à 300 francs CFA. (Un bidon de 20 litres se vendait à 25 francs CFA il y a deux semaines). Une partie de la population, je dirais même la plupart, s’est déversée sur les eaux des puits avec tout le risque que ces eaux sont susceptibles d’engendrer. L’on peut citer en premier lieu les maladies diarrhéiques, surtout chez les petits enfants.

La situation persiste est aucune solution n’est envisageable pour le moment selon le responsable de la STE. La population souffre et crie SOS mais personne ne l’écoute. On dirait qu’il n’y a pas une volonté politique pour résoudre ce problème capital. Ne sachant à quel Saint se vouer, elle se demande – comme moi aussi d’ailleurs – ce que font leurs élus (ou plutôt nos élus), les soi-disant élus du peuples, pointant du doigt les députés.


Blog : Internet, mon vrai obstacle

« Bloguer » à partir d’Abéché devient presque impossible. Le vrai problème qui se pose par rapport aux publications, c’est la connexion Internet avec un ordinateur. Elle n’existe pas. Je dirais même qu’elle n’existe plus.

ConnexionUn blog a besoin nécessairement d’être « alimenté » par des publications régulières. Malheureusement, comme vous le constatez, je passe quelquefois plusieurs jours, voire plusieurs semaines sans publier un seul article sur ce blog. Pourtant les sujets ne manquent pas. Ils sont cumulés sans être publiés et le temps passe.

A Abéché, l’une des plus grandes villes du Tchad, il n’existe qu’un seul Cybercafé dont le débit est très faible et le coût élevé. Une heure de connexion coûte mille francs CFA, et le client ne peut même pas ouvrir sa boîte mail pendant ce temps. L’autre alternative, c’est la connexion « offerte » par les téléphonies mobiles via un modem. Cette alternative aussi un coût très élevé avec une qualité très médiocre. Lorsque je me connecte avec un mode, je ne peux même pas ouvrir une page d’accueil. Alors que l’on parle de service 3G et 4G (3e génération et 4e génération). J’ai l’impression que ce service ne fonctionne que sur les téléphones portables.

Il a fallu que je vienne à Ndjamena (près de mille km) pour pouvoir en parler, pour pouvoir publier certains articles.

Un soir, j’ai appelé un grand frère qui se trouve à Bamako au Mali pour lui dire bonjour. La première question qu’il m’a posée, c’est : « Ton blog n’est plus mis à jour, pourquoi ? Ton dernier article date de plusieurs mois alors que beaucoup de choses se passent à Abéché ».
Le grand frère me fait savoir qu’à Bamako, il possède une installation Internet chez lui, avec un haut débit. Et cela ne lui coûte que 150 000 francs CFA l’année, soit 12 500 francs CFA le mois et juste un peu plus de 400 francs CFA pour toute une journée. Aux Cybercafés de Bamako, une heure de connexion – haut débit – ne coûte que 250 francs CFA.
En termes de comparaison, au Tchad une heure de connexion coûte 1 000 francs CFA ; soit près de sept fois plus  qu’une heure de connexion à Bamako. Ainsi, mon pays reste parmi les pays dont Internet est le plus cher.

Quelle est la situation dans vos villes, dans vos pays ? Les blogueurs, êtes-vous confrontés au même problème ? Comment faites-vous pour alimenter vos blogs ? Laissez un commentaire au bas de cet article s’il vous plaît.


Le mariage précoce, une réalité au Tchad

Mariée à bas âge, la jeune fille dont je parle dans cet article n’a jamais gouté le bonheur de la vie conjugale. Aujourd’hui elle ne garde de ce mariage que les mauvais souvenirs.

Elle se souvient encore du jour où sa mère est venue lui annoncer la nouvelle de son mariage avec l’ami de son père, la cinquantaine, époux de deux autres femmes. Elle avait 14 ans révolus. « L’ami de ton père est un homme riche, responsable, généreux avec tous les membres de notre famille. Il fait partie de notre famille. Tu n’as rien à craindre… » Rassure la maman à sa fille, les larmes aux yeux ; une façon de la convaincre. Elle lui parle comme si elle a d’autre choix que d’accepter cette proposition, disons plutôt cette imposition. En effet, la gentille mère a essayé de s’imposer à ce mariage parce que sa fille est encore petite mais en vain. Le Chef de famille, le décideur a décidé. Trêve de la discussion. Il ne cherche que le bonheur de sa fille. En tout cas c’est ce qu’il pense… il a seulement oublié que c’est un mariage précoce.

Le mariage est célébré, la fille a eu quelques conseils de la sa mère et de ses tentes avant de rejoindre son foyer où l’attend une autre vie : la vie conjugale. Je m’en passe de détails et des difficultés que la jeune mariée a rencontré la nuit de noce, au cours de la « vie conjugale » et avec ses coépouses. Parce que ce n’est le but de cet article.

Le troisième mois suivant la noce, la jeune femme ne voit pas ses règles (aménorrhée) et commence à avoir de la nausée, hyper sialorrhée (elle crache partout), vertige et asthénie physique (fatigue). En notre terme, on parle des « signes sympathiques de la grossesse ». Elle porte en elle un bébé. Et c’est la fierté du mari et de toute la famille. Le ventre pousse peu à peu, la jeune femme surmonte tout grâce aux conseils de sa maman. Elle est enceinte, elle frôle les 15 ans, elle n’était jamais amenée dans une structure sanitaire pour des consultations prénatales (CPN). C’est une grossesse non suivie.

La grossesse est à terme. Ce jour, la future fille-mère commence à avoir des douleurs lombo-pelviennes à type des contractions utérines (parlons simple : elle a mal au ventre) depuis le matin. Les vieilles du village se regroupent autour d’elle et l’accoucheuse traditionnelle fait son travail de tout le temps pour accouchée la fille. La situation n’est si facile que cela. Malgré ses années d’expériences, l’accoucheuse la plus réputée de la zone échoue aujourd’hui. Après deux jours de tentatives, tout le monde décide de l’amener au centre de santé qui se trouve à 9 Km du village. Après examen, le responsable du centre l’évacue d’urgence à l’hôpital pour travail prolongé sur bassin limite. Au fait, le bassin de la jeune femme n’est pas encore développé, n’est pas encore prêt pour porter une grossesse. On parle de « disproportion fœto-pelvienne », toujours en notre terme.

A l’hôpital, elle était prise en urgence au bloc opératoire. Elle a subi une césarienne. Les chirurgiens sort un mort-né de 3500 grammes. Ce n’est pas tout. Etant donné que la tête de l’ « enfant » a compressé la vessie de la « mère » contre les os du bassin durant longtemps, certains tissus se sont nécrosés et la fille a alors connu une fistule vésicale. C’est-à-dire, les urines coulent par le vagin (excusez-moi le terme) et à tout moment, continuellement, sans contrôle. Le personnel a expliqué la situation à la famille et la fille doit subir une autre opération chirurgicale par un spécialiste de réparation de fistule.

Ayant appris la nouvelle, le mari de la malade fait entendre à ses beaux-parents qu’il est désolé et qu’il ne peut pas rester avec une femme qui ne peut pas retenir ses urines. Il la divorce alors qu’elle dans la salle de réveil. La fistule est réparable mais ce n’est pas son problème. « Il est riche, responsable, respecté… » Se rappellent les parents. Rien ne peut l’empêcher d’aller épouser une autre. De quel âge ? Dieu seul sait. La mère, pleurant, accuse le père qui semble avoir un regret pour ce qu’il a fait. Mais à quoi bon ?

Elle se souvient encore de tout cela parce que maintenant c’est fini pour elle. Réparée deux fois (après échec), elle continue toujours par boiter car la compression a lésé le nerf sciatique et aucun homme ne veut d’elle.

L’âge prévu pour le mariage au Tchad est 18 ans, beaucoup de fille sont données en mariage avant 15 ans au vu et au su de tout le monde, les conséquences sont là, connues de tous, les auteurs/contrevenants ne sont pas punis … la pratique continue et ce sont nos sœurs qui encaissent.

Le village des femmes de l’Hôpital Régional d’Abéché qui prend en charge les malades de fistule obstétricale a réparé des centaines de femmes depuis sa création en 2008. Aujourd’hui, une vingtaine de femmes attendent à être opérée.


Que des erreurs. Et les fonctionnaires encaissent.

C’était la fin du mois. Je viens à la banque pour vérifier mon compte et j’aperçois que mon salaire de janvier n’est pas viré. Le guichetier me dit d’appeler le service de solde à N’Djamena pour me renseigner. A la sortie de la banque, je trouve deux de mes collègues qui ont le même problème. Alors, je ne suis pas le seul. Une source proche du service concerné me fait savoir que nous sommes plus de 4600 fonctionnaires à ne pas avoir le salaire du mois de janvier. Tous ces fonctionnaires doivent se présenter à N’Djamena pour voir leurs situations, cas par cas. Pourtant, ils avaient la même chose il y a deux mois. Selon la même source, le travail était mal fait et doit donc être repris. Que des erreurs.

Conséquences : 1. Des nouvelles commissions sont mis sur pied pour retraiter les dossiers ; ce qui coûtera énormément de l’argent et du temps pour l’État. A-t-on coutume de dire « le malheur des uns fait le bonheur des autres ». 2. Les fonctionnaires qui passeraient des semaines, voire des mois, hors de leurs services pourraient réaliser beaucoup de choses le cas échéant.

Vous vous souvenez, en novembre dernier, nous avons publié un lien faisant état de plus de 10.000 fonctionnaires auraient été en « situation irrégulière » et beaucoup sont partis régulariser leur situation.

Des erreurs : La commission n’a pas rendu public son rapport mais je partage avec vous quelques situations : D’abord, la commission s’était trompée sur beaucoup de fonctionnaires et les a taxés à tort et à travers de double salaire. Moi par exemple, j’avais travaillé avec une ONG et j’avais cessé en 2009 quand j’avais réussi le concours de l’Infirmerie. Je suis intégré à la fonction publique en 2013 et comme la commission a trouvé mon dossier à la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS), elle a affiché mon nom sans vérifier la date de cessation du contrat. Une erreur qui m’avait coûté un déplacement inutile et trois semaines hors de mon service. Pour certains qui étaient taxés de double matricule, c’est-à-dire qu’ils prennent deux ou plusieurs salaires dans des ministères différents, le problème est créé au niveau même du service de la solde : certains payeurs ont créé des noms fictifs avec des matricules existants et ouvrent des comptes bancaires avec d’autres noms. Ainsi, deux salaires sont versés chaque fin de mois à un même numéro matricule, une part va à l’intéressé et une deuxième part revient au payeur. Incroyable mais vrai. Comme l’on a l’habitude de dire, « l’impossible n’est pas tchadien ». J’ai vu des copies d’engagements signées par des payeurs pour rembourser l’argent qu’ils ont volé à l’État. Certaines ont même versé une partie au trésor public. Il y en a qui sont en situation irrégulière certes, mais certains irrégularités viennent de l’intérieur du système. C’est peut-être pour ça que la commission n’a pas voulu publier son rapport.

En tout cas, je dois me préparer pour parcourir près de 1000 kilomètres (x2) et je ne sais pas quand le retour.